L'interdiction de survol de la Russie pour les compagnies d'Europe occidentale combinée à la faiblesse du tourisme émetteur chinois rendent l'exploitation de lignes aériennes vers la Chine de moins en moins attractive.
Quelque chose ne tourne pas rond pour les transporteurs aériens européens se rendant en Chine. Le coup de semonce est intervenu début août avec l’annonce par British Airways de la suspension de sa ligne Londres Heathrow-Pékin le 26 octobre. La compagnie avait repris cette ligne en juin 2023 à raison de quatre fréquences par semaine. Elle explique sa décision par des coûts d’exploitation trop élevés en raison de l’interdiction de survol du territoire russe. Ce qui rallonge en moyenne le temps de vol de deux heures. Avec pour conséquence évidente une hausse de consommation de carburant, estimée à 15%.
Le transporteur a indiqué que cette décision était certes « temporaire » et qu’elle sera réévaluée en 2025. British Airways conserve néanmoins ses lignes sur Shanghai et Hong Kong.
Les compagnies européennes se concentrent sur Pékin et Shanghai
La compagnie nationale britannique n’est pas la seule à revoir son réseau vers la Chine. Ainsi, quelques semaines avant l’annonce de BA, Virgin Atlantic indiquait suspendre définitivement sa ligne Londres Heathrow-Shanghai, qu’elle exploitait depuis quelque 25 ans. Elle était la dernière ligne du transporteur en Chine après avoir fermé sa liaison sur Hong Kong en 2022.
Généralement, les programmes de vols des compagnies aériennes d’Europe de l’Ouest sur la Chine ont subi un véritable dégraissage par rapport à l’avant-Covid. Plusieurs facteurs affectent une reprise plus solide de l’axe aérien Europe-Chine. Outre l’interdiction russe, on peut citer la faible reprise du tourisme chinois vers l’Europe en raison de difficultés économiques. Ainsi qu’un climat de défiance entre l’occident et la Chine, qui se traduit par des courants d’affaires moindres. La simplification des visas pour se rendre en Chine pour les Occidentaux n’aura que peu influencé cette évolution.
Côté transport aérien, on s’aperçoit que la plupart des compagnies aériennes d’Europe de l’Ouest ont ainsi réduit leur réseau aux seules dessertes de Pékin et de Shanghai en Chine Populaire.
Finnair et Lufthansa exploitaient avant le Covid le plus grand nombre de lignes sur la Chine. La compagnie finlandaise se posait ainsi à Canton, Chongqing, Nanjing, Pékin, Shanghai et Xian. Elle n’exploite plus qu’une unique ligne vers Shanghai.
Lufthansa exploitait également un réseau d’une dizaine de lignes sur la Chine avant la pandémie de Covid. Le transporteur allemand desservait notamment des destinations uniques pour une compagnie européenne comme Shenyang ou Qingdao. Cet été, Lufthansa ne se pose plus qu’à Pékin et Shanghai. Même si elle offre la plus grande capacité en sièges de toutes les compagnies européennes, à raison de quatre vols quotidiens – deux au départ de Francfort comme au départ de Munich.
Le PDG de Lufthansa Carsten Spohr, a récemment évoqué davantage de liaisons à l’avenir. Mais elles n’ont aucune chance de se concrétiser aussi longtemps que l’espace aérien russe reste fermé.
Quant à Air France-KLM, le réseau s’est également réduit aux dessertes de Pékin et Shanghai. Le binôme n’a pour l’instant toujours pas repris ses lignes vers Canton, Chengdu, Hangzhou, Tianjin, Wuhan et Xian depuis la crise sanitaire.
Les compagnies chinoises en profitent
La fermeture de l’espace aérien russe aux compagnies occidentales ne fait cependant pas que des malheureuses. Dans une récente étude parue début août, le consultant aérien OAG faisait une analyse de la situation aérienne entre la Chine et l’Europe. Avec ce constat que les compagnies chinoises avaient très fortement augmenté leur présence. OAG indique que les compagnies chinoises offraient ainsi en août plus de 7 millions de sièges à l’international, en hausse de 54% par rapport au même mois de 2023.
Sur un axe Chine/Europe occidentale, le nombre de fréquences sur la saison d’été est passée de 6 568 vols en 2023 à 11 317 vols en 2024. Soit une augmentation de 72,3% sur un an. Et une augmentation de 13,2% par rapport à l’été 2019 ( 9 997 vols).
Pour cette saison d’été, le nombre de fréquences des compagnies chinoises par destination est même supérieure de 120% à 2023 pour Istanbul, Madrid, Budapest et Paris. La capitale française bénéficie ainsi de 1 065 fréquences avec la Chine contre 482 sur la saison précédente.
Cependant, Paris n’a toujours pas retrouvé son niveau de 2019. Le nombre de fréquences reste en effet en retrait de 41,5% par rapport à 2019. La capitale française est ainsi la seule ville d’Europe à avoir moins de vols qu’en 2019.
Fréquences des compagnies aériennes chinoises en été vers l’Europe
Nouvelles destinations en Europe
Les transporteurs chinois avec la plus forte augmentation de vols cet été sont, selon OAG, Juneyao Airlines, Shanghai Airlines et Xiamen Airlines. Ces trois transporteurs enregistrent une augmentation de plus de 100% de leurs fréquences d’un été à l’autre. Et même proche de 200% pour Juneyao. OAG indique que cette dernière compagnie a lancé 254 vols vers de nouvelles destinations telles que Athènes, Bruxelles ou Manchester. Tandis que Shanghai Airlines s’est distinguée en devenant le premier transporteur chinois à se poser à Marseille.
OAG constate encore que les trois géants chinois, Air China, China Eastern et China Southern, ont également fortement augmenté le nombre de leurs vols. Air China offre cet été 5 011 fréquences sur l’Europe (+7,3% par rapport à 2019 et +63,7% par rapport à 2023). Avec 2 075 fréquences, China Eastern offre 14,3% de fréquences en plus qu’en 2019 et 83,6% en plus qu’en 2023. Avec notamment le lancement en septembre de vols entre Venise et Shanghai. Enfin, China Southern a stimulé son offre de 16,7% par rapport à 2019 et de 83,8% par rapport à 2023 avec un total de 1 917 fréquences.
Reste maintenant à savoir si le marché aura bien absorbé cette énorme capacité aérienne chinoise. Rien n’est moins sûr dans le contexte géopolitique et économique actuel.
Source : https://www.voyages-d-affaires.com/